Alors que le déconfinement est annoncé à partir du 11 mai prochain, Renaloo s’interroge sur la situation des personnes fragiles, à risques de formes graves de COVID19 en raison de leur santé, notamment dialysées et greffées. Pour elles, ce déconfinement représente un enjeu et une inquiétude considérables. En effet, il leur est notamment conseillé de poursuivre un confinement «volontaire», reposant sur «leur responsabilité», pour leur propre protection et celle du système de santé. Pas si simple, lorsque l’on a un travail, une famille, des enfants, une vie, souvent déjà bien éprouvée par la maladie, de décider – ou pas – de s’enfermer volontairement en s’excluant du reste du monde, qui pendant ce temps va reprendre son cours.
La solidarité sera nécessaire, mais pas suffisante : la société devra aussi les accompagner dans leurs choix, quels qu’ils soient, et leur assurer une protection adaptée et l’accès à des droits spécifiques.
Pour Renaloo, il est donc urgent que les personnes fragiles soient écoutées et entendues dans le débat actuel. La prise en compte de leurs besoins et leur participation sont des conditions nécessaires à leur adhésion aux défis considérables qui s’annoncent. La voix des fragiles est une arme indispensable dont la stratégie de lutte contre l’épidémie ne doit pas se priver.
Fragile ne signifie pas uniquement personne âgée
Alors que l’on considère souvent que les risques de développer des formes graves de la maladie COVID19 sont essentiellement liés à un âge avancé, des personnes plus jeunes, actives, dont la fragilité est due à leur état de santé, sont également concernées. C’est le cas notamment des patients insuffisants rénaux, dialysés et greffés, comme d’autres personnes atteintes de certaines chroniques, qui paient un lourd tribut à cette épidémie.
Pour elles, la perspective de continuer à se protéger, en s’appliquant à elles-mêmes et à leurs proches vivant sous le même toit des règles similaires à celle de la période de confinement comporte des enjeux importants et différents de ceux auxquels sont confrontés les plus âgés. Dans ce contexte, la perspective d’un maintien « volontaire » du confinement, reposant sur leur « responsabilisation », pose évidemment de très nombreuses questions sur le droit à être protégé et à se protéger ainsi que les conséquences à anticiper sur la famille, les enfants, le travail, les ressources, la vie sociale, etc.
Le droit et à la liberté des fragiles à être en société et dans l’espace public, malgré la recommandation de confinement volontaire
Le déconfinement ne doit pas avoir pour conséquence de réserver l’espace public aux personnes peu susceptibles de développer des formes sévères de Covid-19, à l’exclusion de toutes les autres.
Ainsi, l’espace public doit rester adapté aux fragilités, « traditionnelles », par exemple le handicap, mais aussi nouvelles, comme celles liées au virus. Cette garantie d’accès est un des principes fondamentaux d’une société qui se doit de demeurer inclusive.
La nécessité de mesures adaptées pour le travail des personnes fragiles
Les personnes fragiles, lorsqu’elles, ou leurs proches, ont une activité professionnelle, ne doivent pas avoir à choisir entre leur protection contre le virus et les ressources de leur foyer. C’est d’autant plus essentiel que beaucoup d’entre elles cumulent une fragilité sociale avec leurs problèmes de santé.
Cela implique, pour la personne fragile la possibilité de maintenir cette activité dans des conditions de protection adaptées ou celle de l’interrompre aussi longtemps que nécessaire, tout en disposant de ressources de remplacement identiques.
Une réflexion importante sur la poursuite normale des études des élèves et étudiants fragiles
Face aux mesures de confinement instaurées par le gouvernement, les élèves et étudiants en situation de fragilité font face à un enjeu particulier, à savoir le risque que la recommandation de confinement les empêche de poursuivre, ou reporte, leur cursus.
Une réflexion doit ainsi être menée pour évaluer les possibilités de rendre les contraintes de leur protection compatibles avec la poursuite normale de leurs études, ainsi que d’examiner, compte tenu de leur jeune âge qui doit limiter leur risque individuel, les conditions dans lesquelles elles pourraient être poursuivies normalement.
Vivre confiné(e)
Depuis le début de la crise, les personnes fragiles sont les plus vulnérables et doivent faire l’objet d’une attention particulière. Face à cette situation difficile de déconfinement, la solidarité de la société doit être un pilier pour les personnes fragiles.
Il est donc important que l’ensemble de la société et le gouvernement prennent en compte tous les éléments « d’environnement » qui vont influencer leur capacité à se protéger, par exemple le fait qu’elles aient des enfants scolarisés, ou encore les conditions de leur habitat.
En outre, le confinement a des conséquences psychologiques, à plus forte raison s’il se prolonge pour des personnes qui portent déjà le lourd fardeau de maladie, il est donc important de mettre en place des dispositifs adaptés pour y faire face. De même, encourager le maintien dans des conditions adaptées des liens familiaux et sociaux et l’accès aux services du quotidien sera une nécessité dès le déconfinement.
À propos de Renaloo
L’association Renaloo est née en 2002, sous la forme d’un blog et à l’initiative d’une patiente, qui entendait témoigner et partager son expérience de l’insuffisance rénale terminale.
Renaloo est aujourd’hui la première communauté web francophone de patients et de proches dédiée à l’insuffisance rénale, la greffe et la dialyse. C’est aussi une association de patients agréée, très engagée dans le domaine de la démocratie en santé, pour améliorer la qualité des soins, de la vie, de l’accompagnement des personnes qui vivent avec une maladie rénale.
A propos de l'auteur
Laurent Mignon
De la défense des vignobles français sur les marchés export à la e-santé, en passant par la différenciation des molécules et la valorisation de la recherche médicale et biomédicale ou la mise en perspective de l’esprit scientifique et l’image des entreprises et de leurs porte-parole, un seul but : créer du lien entre les acteurs d’un même domaine. Sa méthode : « l’immersion ». Comprendre les enjeux, apporter de nouvelles idées et méthodes, être créatif mais aussi savoir dire non et aiguiller sur d’autres approches font son quotidien.