Suite à la parution d’un dossier dans son magazine n° 581 et daté de juin, l’UFC-Que Choisir a annoncé ce jour via un communiqué de presse1 saisir l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et la DGCCRF vis-à-vis des isoflavones contenues dans les produits à base de soja. Face aux allégations de l’UFC-Que Choisir, Sojaxa, en tant que première association d’entreprises proposant des produits au soja français, réaffirme se tenir à disposition de l’Anses, dont l’expertise est remise en question par Que Choisir.
Une méthodologie surprenante…
Alors qu’il existe un repère officiel défini par l’Anses, l’UFC-Que Choisir innove en définissant un nouveau repère qui ne repose pas sur une expertise scientifique mais sur « des travaux sur modèle animal récents ».
… en désaccord avec les recommandations et la réalité de la consommation
Comme l’indique Gwénaële Joubrel, Directrice scientifique de Sojaxa : « La compatibilité entre le niveau d’exposition des différents types de consommateurs et la préconisation de l’Anses, seule recommandation officielle acceptable, est une réalité que personne ne peut nier ». De fait, et même si aujourd’hui plus de 6 Français sur 10 ont déclaré avoir mangé des produits au soja, rares sont ceux dont la consommation de produits au soja induirait un dépassement de l’apport quotidien en isoflavones proposé par l’Anses.
Le soja, des atouts nutritionnels indéniables… sur lesquels l’UFC-Que Choisir passe plus que rapidement
Après avoir indiqué que les produits au soja séduisent un large public soucieux de limiter sa consommation de viande, tant pour sa santé que pour celle de la planète et que ses atouts nutritionnels sont bien réels, le dossier de l’UFC-Que Choisir fait une impasse totale sur ce sujet. « Comme pour tout aliment, il faut évaluer les produits au soja au sein d’une alimentation diversifiée : personne ne consomme exclusivement des produits au soja ! Dans une alimentation équilibrée, les aliments au soja apportent leur contribution nutritionnelle, dont une quantité modeste mais utile d’isoflavones » spécifie Gwénaële Joubrel.
Le soja a, en effet, des atouts conséquents. Il est riche en protéines de très bonne qualité nutritionnelle3, 4 et 5. Par ailleurs, la consommation d’aliments au soja contribue à limiter les apports excessifs en acides gras saturés. Le profil en acides gras du soja est caractérisé par un faible apport en acides gras saturés et une majorité d’acides gras insaturés (85 % des acides gras totaux dont 7 % d’acides gras polyinsaturés oméga-3). Ce profil particulier permet aux aliments au soja de participer au maintien d’un taux normal de cholestérol circulant, ce taux étant un marqueur du risque cardiovasculaire.
Les 2 isoflavones majeures du soja, la daidzéine et la génistéine, ont une structure chimique proche de l’œstradiol6. Mais leur activité est bien moindre et différente de celle des œstrogènes féminines. Comme l’indique une publication scientifique de 20163, les isoflavones du soja seraient à l’origine de nombreux effets bénéfiques pour la santé et pourraient participer à réduire le risque de maladie cardiovasculaire et de certains cancers.
Certaines publications scientifiques ont laissé supposer que les isoflavones pourraient avoir des effets défavorables sur la santé, mais ces publications reposent principalement sur des modèles animaux. L’Autorité européenne de sécurité des aliments a récemment conclu que les isoflavones ne nuisent pas à la santé des femmes ménopausées (notamment vis-à-vis du cancer du sein et concernant la fonction thyroïdienne).
Pour Olivier Clanchin, Président de Sojaxa : « Les produits au soja, issus de l’agriculture française et garantis sans OGM que proposent nos membres, ont toute leur place dans le cadre d’une alimentation diversifiée et équilibrée. Ces produits, tels que nous les concevons, sont une opportunité pour répondre aux enjeux de santé individuels et collectifs actuels tout en étant respectueux de l’environnement. Ce sont ces valeurs et apports que nous souhaitons plus que jamais faire reconnaître et nous sommes, comme toujours, à la disposition de l’Anses si celle-ci décide d’actualiser ce dossier ».
Modulateurs, perturbateurs endocriniens… de quoi parle-t-on ?
L’OMS a défini les perturbateurs endocriniens comme une substance ou un mélange de substances, qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de (sous)-populations.
Pour leur part, les modulateurs endocriniens sont des substances ou un mélange de substances qui modifient les fonctions du système endocrinien et de ce fait induisent des effets pouvant être positifs ou négatifs dans un organisme intact.
Comme l’a rappelé le Dr Jean-Michel Lecerf, chef du service de nutrition de l’Institut Pasteur de Lille, dans un article du 8 février 20192 « Dans l’état actuel des connaissances, on peut être rassuré. (…) Qualifier le soja de perturbateur endocrinien me semble tout à fait inapproprié bien qu’il y ait des effets hormonaux ». Le soja ou plus précisément les isoflavones du soja devraient être considérés comme des modulateurs.
Références
1 Communiqué de presse – 23 mai 2019 – Perturbateurs endocriniens dans les produits à base de soja. L’UFC-Que Choisir saisit l’Anses et la DGCCRF. Consulté le 23 mai 2019. https://www.quechoisir.org/action-ufc-que-choisir-perturbateurs-endocriniens-dans- les-produits-a-base-de-soja-l-ufc-que-choisir-saisit-l-anses-et-la-dgccrf-n66983/.
2 Le soja et ses isoflavones sont-ils bons ou mauvais pour la santé ? 8 février 2019. Consulté le 23 mai 2019. https://www.santemagazine. fr/alimentation/aliments-et-sante/le-soja-et-ses-isoflavones-sont-ils-bons-ou-mauvais-pour-la-sante-198799
3 Rizzo G et Baroni L., “Soy, soy foods and their role in vegetarian diets”, Nutrients 2018, 10, 43.
4 Messina M, “Soy and health update: evaluation of the clinical and epidemiologic literature”, Nutrients 2016, 8,754.
5 Chevalier D et al., « Les aliments au soja : consommation en France, qualités nutritionnelles et données scientifiques récentes sur la santé », OCL, 2016, 23(4) D405.
6 Chatterjee C et al., “Soybean bioactive peptides and their functional properties”, Nutrients 2018, 10, 1211.
A propos de l'auteur
Sarah Gacemi
Sarah rejoint LauMa après un Mastère spécialisé en école de commerce en alternance chez Total, et un Magistère Journalisme et Communication des Organisations à Aix-en-Provence, où elle effectue un détour par les Etats-Unis. De l’industrie à la santé, les différents secteurs d’activités sont, pour elle, l’occasion de repenser son métier au contact de chaque client.