Face à l’épidémie, les urologues -comme tous les soignants- doivent adapter leur pratique afin de limiter les risques de contamination au COVID19 mais en même temps, ne pas faire perdre de chance à leurs patients touchés par un cancer uro-génital. Pour guider chacun d’entre eux, des recommandations ont été rédigées par le Comité de Cancérologie de l’AFU (CCAFU).
Primum non nocere. En temps d’épidémie, cet adage prend tout son sens. Le confinement de la population et la réorganisation complète du système de soin pour prioriser la prise en charge des patients touchés par le coronavirus, entraînent une remise en cause de certains protocoles de soins utilisés en routine.
Afin de guider les onco-urologues et leur permettre de faire les choix les plus adéquats à la fois pour protéger leurs équipes des risques de contamination mais également offrir à leurs patients les soins les plus adaptés à leur situation, le Comité de Cancérologie de l’Association Française d’Urologie (CCAFU) a recensé les données de la littérature. Cet avis d’experts ne constitue pas une recommandation fondée sur l’evidence based medicine, mais plutôt un recueil de conseils pour une prise en charge optimisée face à l’urgence sanitaire.
« L’urologue en collaboration avec les membres de la Réunion de Concertation Pluridisciplinaire restent les décideurs responsables du traitement pour chaque patient donné, en prenant en compte la pathologie, mais également l’âge, les comorbidités, et les ressources disponibles dans l’établissement de santé concerné ou son environnement » rappelle le Pr Yann Neuzillet.
« Ces recommandations sont provisoires et pourraient être modifiées en fonction de la durée de la crise actuelle », ajoute le Pr Georges Fournier Président de l’AFU.
Des enjeux inédits, des réponses adaptées
Quatre enjeux phares ont été identifiés :
- Soigner, et ne pas faire « perdre de chance » aux patients dans un contexte où l’essentiel des forces vives et des installations médicales sont orientées vers la prise en charge de l’épidémie.
- Développer de nouvelles formes de consultation (notamment par télémédecine) pour suivre les patients sans favoriser la propagation du virus (pour les patients et pour les soignants).
- Prioriser les examens en fonction des urgences urologiques et du pronostic du patient.
- Éviter autant que faire se peut le passage à l’hôpital qu’il soit programmé, ou consécutif à une urgence (modifier les protocoles quand c’est nécessaire pour favoriser l’ambulatoire, l’hospitalisation à domicile, et réduire les temps de bloc. Adapter la prise en charge en privilégiant dans certains cas une approche médicamenteuse initiale plutôt que la chirurgie…).
Parmi les mesures générales préconisées pour répondre à ces enjeux :
- La protection des personnes soignants qui passe notamment par le port, par les patients, de masques FFP1 et certaines précautions particulières à respecter lors des interventions chirurgicales,
- le maintien des RCP si possible sous forme dématérialisée (visioconférence),
- la suspension des protocoles de recherche
- et enfin le recours privilégié à la RAAC afin de minimiser le risque de complications post-opératoires et la durée du séjour hospitalier
Prostate, vessie, rein, testicule comment suivre au mieux les patients ?
Pour faire face à ces enjeux, il est également essentiel de déterminer pour quels patients une prise en charge immédiate est essentielle et pour quels patients une prise en charge différée ne modifiera pas le pronostic en termes de guérison « Il est souhaitable de rapprocher la surveillance des patients ayant un cancer avancé pour éviter au maximum la nécessité de recours aux hospitalisations non-programmées et les passages aux services des urgences. » ajoute le Pr Neuzillet.
Un document de 26 pages est à la disposition des urologues, radiothérapeutes et oncologues médicaux pour guider leurs choix thérapeutiques. Cinq cancers sont concernés, les trois plus fréquents, prostate, vessie et rein, ainsi que les cancers des organes génitaux externes (testicules, pénis). Pour chaque cancer, en fonction du grade de la tumeur, de sa taille, de son potentiel évolutif, du stade localisé ou non, métastatique ou non, les recommandationsindiquent s’il est justifié de reporter certains examens, de modifier certains protocoles, de simplifier la prise en charge, ou si au contraire tout retard de traitement risque d’entrainer une perte de chance pour le patient.
« Dans tous les cas, l’accompagnement du patient est essentiel par le biais d’une information claire et compréhensible de la stratégie diagnostique et thérapeutique entreprise » conclut le Pr Arnaud Méjean, Responsable du CCAFU.
En savoir plus : www.urofrance.org/base-bibliographique/recommandations-ccafu-sur-la-prise-en-charge-des-cancers-de-lappareil-urogenital-en-periode-epidemie-covid-19
À propos de l’AFU
L’Association Française d’Urologie est une société savante représentant plus de 90 % des urologues exerçant en France (soit 1 133 médecins). Médecin et chirurgien, l’urologue prend en charge l’ensemble des pathologies touchant l’appareil urinaire de la femme et de l’homme (cancérologie, incontinence urinaire, troubles mictionnels, calculs urinaires, insuffisance rénale et greffe), ainsi que celles touchant l’appareil génital de l’homme. L’AFU est un acteur de la recherche et de l’évaluation en urologie. Elle diffuse les bonnes pratiques aux urologues afin d’apporter les meilleurs soins aux patients, notamment via son site internet urofrance.org et un site dédié aux patients urologie-sante.fr.
A propos de l'auteur
Laurent Mignon
De la défense des vignobles français sur les marchés export à la e-santé, en passant par la différenciation des molécules et la valorisation de la recherche médicale et biomédicale ou la mise en perspective de l’esprit scientifique et l’image des entreprises et de leurs porte-parole, un seul but : créer du lien entre les acteurs d’un même domaine. Sa méthode : « l’immersion ». Comprendre les enjeux, apporter de nouvelles idées et méthodes, être créatif mais aussi savoir dire non et aiguiller sur d’autres approches font son quotidien.