COMMUNIQUE DE PRESSE
A l’occasion d’une table ronde qui s’est tenue le lundi 17 janvier 2011 à l’Hôpital Américain de Neuilly-sur-Seine, l’association CrossWorlds HealthCare Professionnals (CWHCP) a présenté une étude qualitative intitulée « Optimiser les collaborations entre Institutions de Recherche et de Soins et Industriels de santé » (OCIRSIS).
Cette étude met en avant certaines différences quant à l’appréciation de l’importance relative des principaux leviers d’optimisation de l’efficacité et de l’efficience des systèmes de santé et des domaines dans lesquels une collaboration plus étroite est nécessaire.
Elle relève néanmoins de nombreuses convergences entre industriels et institutions de soins et de recherche. Convergences mises en exergue par les 6 experts hospitaliers réunis autour du Docteur Valery Labonne, président de l’association et Hervé Drevot, consultant en stratégie dans le domaine de la santé lors de la table ronde.
Recherche et développement pour l’industrie, prévention, dépistage, pertinence du diagnostic et de la prise en charge pour les institutions de soins et de recherche
A la question « quels sont pour vous les 5 leviers les plus puissants pour améliorer l’efficacité de la prise en charge et l’efficience des soins », les représentants des industriels et des Institutions de recherche et de soins convergent avec quelques nuances sur les 5 priorités pour l’écosystème de la santé.
Les Industriels mentionnent dans 80% des entretiens « l’augmentation de l’efficacité de la recherche et du développement » et le « renforcement de la continuité et la coordination des soins ».
Pour cette même question, les représentants des institutions de soins et de recherche interrogés dans le cadre de l’étude considèrent également l’amélioration de l’efficacité de la recherche et du développement » comme un levier majeur. Toutefois, ils insistent davantage sur la nécessité de « favoriser la prévention et le dépistage » (70% des industriels placent cet item dans les 5 principaux leviers) et « d’amélioration de la pertinence du diagnostic et de la prise en charge » (60% des industriels).
Des visions globalement convergentes quant aux gisements de progrès
Si industries et institutions de recherche et de soins ne portent pas tout à fait le même regard sur la hiérarchie des leviers d’optimisation de l’efficacité et de l’efficience du système de santé, ils convergent sur les trois items pour lesquels des collaborations plus étroites et mieux organisées peuvent avoir un impact majeur sur l’efficacité et l’efficience des systèmes de santé.
Ainsi, tant pour les industriels que pour les institutions de recherche et de soins, « la systématisation de l’approche collaborative dans la recherche et le développement » est identifiée comme un gisement majeur pour accroître l’efficacité de la R&D et accélérer la mise au point de solutions de diagnostic et de prise en charge réellement innovantes. De même, en aval de la chaîne de valeur, ils estiment que des projets collaboratifs peuvent avoir un impact très positif dans l’amélioration de la pertinence du diagnostic et la qualité de la prise en charge ainsi que dans le renforcement de l « continuité et la coordination des soins »
A noter que le levier « réduire le délai de mise à disposition » (de nouveaux traitements, ndlr) ne semble pas constituer un enjeu majeur de collaboration.
Les personnes interrogées mettent en avant la nécessité de structurer davantage ces projets multidisciplinaires en partant des objectifs communs, pour maximiser les bénéfices mutuels, renforcer la confiance réciproque et offrir la plus grande transparence et éviter ainsi que les investissements consentis autour de ces projets puissent être contestés.
Des données à la pratique
Acteur fédérateur, l’association CWHCP a souhaité donner à la présentation des résultats de cette étude un caractère concret. Ainsi, lors de la table ronde de présentation, 6 experts reconnus ont pu illustrer les différents items de cas pratiques et de réflexion afin de faciliter la mise en partage de ces exemplarités.
Transformation du modèle recherche et développement : nouveaux modes de collaboration
Pour le Pr Jean-Yves Blay, Président de l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer, Oncologue au Centre Léon Bérard, Lyon, les nouveaux modes de collaboration (sur le principe des clusters ou des réseaux) ont un objectif principal : optimiser l’efficacité de la recherche.
Dans le cadre du cancer, il s’agit de « développer plus efficacement des médicaments actifs dont le développement est guidé par la compréhension de la biologie de la maladie, ». Cet objectif implique une démarche rationnelle ou les cancers traités sont rassemblés dans des sous-groupes bien caractérisées sur le plan moléculaire, permettant une meilleure connaissance de la maladie (caractérisation de l’anomalie moléculaire primaire) et un ciblage adapté de l’anomalie moléculaire (thérapeutique ciblée sur l’oncogène). Il s’agit donc de modifier le périmètre des études et d’inclure au sein de celles-ci non pas une large population non sélectionnée, mais un sous-groupe rassemblant 1,5 parfois 10% des cas seulement, mais chez qui le traitement ciblé considéré sera efficace.
Accroître l’impact de l’évaluation des technologies de santé (HTA)
Si l’étude confirme que l’HTA est perçu comme un outil susceptible d’accélérer la transformation des systèmes de santé, elle pointe également de nombreuses barrières restent à surmonter (absence de consensus, proliférations des agences d’évaluation, extrême variabilité dans l’exécution et l’utilisation des évaluations, manque de lisibilité des critères, insuffisance des ressources…). Dans ce contexte, le Professeur Samuel Limat, Chef de département dans le pôle pharmaceutique, CHU de Besançon, réitère que l’optimisation de l’évaluation médico-économique répond à des exigences partagées entre l’ensemble des acteurs : la gestion du risque (propre au médicament et lié à son mésusage), la recherche de la performance (impact sur la maladie et efficience) et la modification de l’offre de soins (place du médicament et contractualisation).
Pour le Pr Limat, des partenariats dans la conception et l’exploitation d’études post-AMM sont susceptibles de faire progresser de manière pragmatique l’évaluation des technologies de santé. Ceux-ci reposent sur un « partage » de l’utilisation post-AMM, le développement d’une observation pragmatique, organisée et explicative, l’intégration de paramètres cliniques et économiques, un suivi intégré aux soins. Il s’agit d’intégrer les études cliniques dans la vraie vie. D’aller au-delà de l’étude expérimentale portant sur une population homogénéisée très encadrée pour valider les résultats en situation réelle.
Optimiser la pertinence du diagnostic et la personnalisation de la prise en charge
Face à cet enjeu le Professeur Dellamonica, Responsable du Pôle Clinique Universitaire des Spécialités Médicales, Chef du Service d’Infectiologie, CHU de Nice, a tenu à mettre en exergue le rôle clé que peut et doit jouer un dossier médical partagé et structuré.
Compte tenu de la complexité des pathologies (cancers, infections VIH…), des interventions, de la multiplicité des professionnels impliqués, il estime indispensable de développer des dossiers médicaux électroniques spécialisés partagés. A travers Nadis® (dossier médical informatisé structuré), développé à l’origine par le CHU de Nice et aujourd’hui largement déployé, le Professeur Dellamonica a ainsi démontré l’apport de ce type d’outil pour structurer des filières de soins et optimiser la prise en charge des patients.
Nadis® permet de partager une meilleure compréhension du patient et normaliser la prise en charge. Il permet la mise en place d’EPP et de RCP. Pour les soignants, il apporte des gains de temps, favorise l’accès à des référentiels (score, bases médicaments) et contribue à diffuser l’expertise au sein des équipes.. Au-delà de ses applications sur le terrain, Nadis est aujourd’hui un outil essentiel à la recherche clinique : qu’il s’agisse d’optimiser le ciblage d’études, d’accélérer le recrutement des patients, de lire en temps réel les données d’études de phase IV, d’évaluer les coûts/bénéfices respectifs de différentes stratégies de prise en charge et d’accélérer la vitesse de publication ….
Rendre le patient acteur de santé
Avant d’illustrer ce thème via son expérience dans la mise en place de programme d’ETP, le Professeur Michèle Kessler, ancien Chef du service de Néphrologie au CHU de Nancy/Réseau NEPHROLOR, a tenu à rappeler qu’ « il n’y a pas d’ETP efficace sans coordination de la prise en charge » et qu’aujourd’hui coordination et approche multidisciplinaire sont indispensables.
Pour le Professeur Kessler trois préalables sont nécessaires à la réussite d’un programme : l’inscription du programme dans une logique de filière de soins multidisciplinaire hôpital/ville, l’adhésion de l’équipe soignante au sens large et la capacité à dégager du temps pour le patient. Elle a aussi souligné certaines difficultés: Rôle des Unités Transversales d’Education Thérapeutique créées par la loi HPST, formation des animateurs, partage et diffusion des programmes, financement (ni l’hôpital ni l’assurance maladie ne prenant en charge la création et le développement des outils d’ETP).
Le professeur Kessler indique que l’évaluation de l’impact des programmes sur la santé des patients et les coûts de prise en charge constitue un axe de progrès important.
A travers les exemples d’ « éduGreffe » et d’ « E’dire », le Professeur Kessler a également dégagé les grandes lignes de partenariats possibles avec les industriels dans le cadre de l’ETP. Pour elle, l’industrie est indispensable pour financer la création et le déploiement des outils mais des limites s’imposent dans la construction du programme.
Renforcer la continuité et la coordination du parcours de soins
Le docteur Patrick Rambourg, Chef du pôle hospitalo-universitaire pharmacie, CHU de Montpellier, a partagé deux exemples concrets illustrant le décloisonnement du parcours de soins et 4 mots clés : connaissance, continuité, concertation et coordination.
A travers l’exemple de la délivrance de seringue pré remplies de Cytarabine, pour l’administration en ambulatoire à l’attention des enfants atteints de leucémies aiguës ou chroniques ou celui de la mise en place d’une lettre de sortie pharmaceutique assurant la coordination pharmacie hospitalière / officine de ville, le
Dr Rambourg a mis en évidence les principales barrières à surmonter : celles liées aux informations (fiabilité, confidentialité, interopérabilité, fluidité, délivrance aux patients) et celles directement liées à l’identification et à la coordination (identification des professionnels de santé impliqués, identification des recours familiaux et sociaux, redondances des traitements, soins, examens, analyses…).
Tirer parti des potentialités des technologies d’information et de la communication
Le Professeur Philippe Arnaud, Chef du service de pharmacie de l’hôpital Bichat, Paris, a rebondi sur les propos des organisateurs qui indiquaient que les technologies de l’information et de la communication restaient largement sous utilisées dans le secteur de la santé que ce soit en France ou dans le monde. Il a indiqué que les soins de santé sont de plus en plus complexes à mesure que les techniques et pratiques cliniques évoluent. La prise en charge centrée sur le patient implique une coordination entre des professionnels de plus en plus nombreux. La quantité de données ne cesse, elle aussi, d’augmenter.
Guider les décisions cliniques à partir de données probantes, rendre disponible la connaissance intime du patient auprès de l’ensemble de l’équipe de soins, exploiter les données de la vie réelle pour optimiser les stratégies thérapeutiques, renforcer la pharmacovigilance, améliorer la formation des professionnels, réussir la structuration de véritables réseaux de soins.., tous ces enjeux impliquent d’accélérer la mise en œuvre des TIC. Trop d’échecs, de retards dans la mise en œuvre des projets s’expliquent, selon lui, par un déficit d’implication des professionnels de terrain.
Tout en reconnaissant le rôle crucial que doit jouer la télémédecine, il a souligné la nécessité de conserver le colloque singulier entre patient et professionnel de santé, l’examen clinique restant indispensable.
En conclusion, le Pr Arnaud estime qu’il est nécessaire de développer des partenariats pour accélérer la mise en œuvre des technologies de l’information dans approche gagnant-gagnant ou chacun (industriels et professionnels de santé) doit « rester dans son domaine de compétence, pour mieux soigner tout en développant la pharmacovigilance, l’efficience et la recherche clinique .
A propos de l’étude « Optimiser les collaborations entre Institutions de Recherche et de Soins et Industriels de santé » (OCIRSIS)
Après avoir observé les pratiques d’autres secteurs (aéronautique, automobile, Hightech…) et les mutations en cours dans la santé, les membres de l’association CrossWorlds HealthCare Professionnals (CWHCP) ont souhaité étudier les bénéfices éventuels que pourraient apporter de nouveaux modèles de collaborations entre Institutions de recherche et de soins et Industriels de santé aux différentes étapes de la chaine de valeur de la santé.
Dans cette perspective, l’association CrossWorlds HealthCare Professionnals (CWHCP) a réalisé une étude européenne (France, Royaume-Uni, Allemagne, Belgique, Suisse) auprès d’une centaine d’experts hospitaliers, régulateurs, payeurs, associations de patients et décideurs au sein des industries de santé au niveau international pour dresser les contours des collaborations de demain.
Pilotée par un groupe de 6 experts et réalisée avec l’aide de Hervé Drevot, consultant en stratégie dans le domaine de la santé, cette étude s’appuie sur des entretiens face à face approfondis de 1 à 2 heures menés en 2010 et analysés au dernier trimestre.
Cette étude couvre les différents segments de la chaine de valeur de la santé depuis la recherche jusqu’à la prise en charge globale du patient. L’objectif de cette étude est d’ « identifier des leviers pour apporter un meilleur service au patient tout en maitrisant les coûts du système » explique Valery Labonne, président de l’association Crossworlds Healthcare Professionnals.
Présentation de la synthèse de l’étude et des présentations des experts issues de la table ronde disponible sur demande.
A propos de l'auteur
Emmanuelle Klein
Surfant sur le petit monde des relations presse depuis plus de 20 ans, c’est en poussant les portes des rédactions des médias chauds qu’elle s’est forgée son expertise. Gastronomie, sport, recherche fondamentale peu importe le flacon… elle a compris que les contraintes des médias étaient les siennes et aime particulièrement relever des défis de n’importe quelle nouvelle interrogation.